Le projet d’accord commercial entre l’Union européenne (UE) et le bloc latino-américain Mercosur suscite des réactions vives en France, mobilisant agriculteurs et responsables politiques.
En quoi consiste l’accord UE-Mercosur ?
L’accord de libre-échange entre l’UE et le Mercosur — un regroupement de cinq pays sud-américains (Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay et Bolivie) — est destiné à stimuler les échanges commerciaux en éliminant progressivement presque tous les droits de douane. Cet accord, s’il est conclu, représenterait une avancée majeure en termes de volume d’échanges, couvrant une population de 780 millions de personnes et générant un commerce annuel estimé entre 40 et 45 milliards d’euros.
Les produits européens comme les voitures, les vêtements ou le vin pourraient bénéficier d’un accès facilité aux marchés sud-américains. En contrepartie, des concessions importantes ont été prévues, notamment des quotas pour l’importation de viande bovine, de volaille et d’autres denrées.
Des inquiétudes profondes chez les agriculteurs
Le secteur agricole français est vent debout contre cet accord. Les éleveurs et agriculteurs dénoncent une concurrence qu’ils jugent déloyale, en raison des normes moins strictes en matière sanitaire et environnementale dans les pays du Mercosur. Par exemple, le Brésil, principal exportateur de viande bovine au monde, est critiqué pour l’utilisation d’hormones interdites en Europe.
La suppression des droits de douane sur de grandes quantités de produits agricoles, comme 99 000 tonnes de viande bovine taxées à 7,5 %, accentue les craintes. Ces mesures pourraient entraîner des baisses de revenus pour les agriculteurs français, déjà fragilisés par un contexte économique difficile.
Mobilisation dans le milieu agricole
Face à cette situation, les syndicats agricoles français, notamment la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs, appellent à des manifestations dans tout le pays. Des rassemblements sont prévus dès lundi, avec des actions devant les préfectures ou sur des axes routiers stratégiques.
D’autres syndicats, comme la Coordination rurale et la Confédération paysanne, s’opposent également à l’accord mais adoptent des modes d’action distincts.
Une opposition politique transpartisane
L’accord Mercosur divise profondément la classe politique européenne, mais en France, il suscite un consensus rare. Plus de 600 parlementaires ont récemment exprimé leur désaccord, invoquant des préoccupations environnementales, sociales et économiques.
Le président Emmanuel Macron, initialement favorable à l’accord, a changé de position en 2019, invoquant des préoccupations liées à la déforestation en Amazonie. Son premier ministre, Michel Barnier, a réitéré cette opposition, exigeant des normes plus strictes et des garanties environnementales renforcées.
Un avenir incertain pour l’accord
La signature de l’accord dépendra des négociations entre la Commission européenne et les États membres. Même après sa signature, le traité devra être ratifié par tous les parlements nationaux, ce qui pourrait poser problème en raison des divergences d’opinions.
Certaines options sont envisagées pour contourner ces obstacles, comme diviser l’accord en deux volets. Cette approche pourrait permettre une adoption simplifiée de la partie commerciale, en excluant les sujets les plus sensibles nécessitant l’unanimité.
Cependant, la France reste isolée dans son opposition. Des pays influents comme l’Allemagne et l’Espagne soutiennent fermement l’accord, espérant qu’il stimulera la croissance économique européenne.
Dans les semaines à venir, le sort de l’accord UE-Mercosur dépendra des rapports de force entre ses partisans et ses détracteurs. En France, les mobilisations prévues dans les prochains jours pourraient bien cristalliser ce débat à l’échelle nationale et européenne.